Le blog coruscant et capricant d'un couple de garçons en retour d'exil

vendredi 28 décembre 2012

Lalouze mène l'enquête

J'ai eu une sacrée revanche karmique, cette année. En plus d'avoir troqué ma classe « cour des miracles » contre la fine fleur de la nation, je finis ma semaine le vendredi à 14H00. J'aurais préféré gagner un million au loto, mais il paraît que le karma voit toute jérémiade d'un mauvais œil et que, du coup, il nous en jette un. 
Tout en rêvassant à la façon dont j'allais employer mon week-end (probablement à rêvasser), je revenais d'une petite virée en ville, écouteurs de l'I-pod vissés dans les oreilles, lorsque je rencontrais sur le trottoir un élément perturbateur en la personne de Cinderella Lalouze : elle marchait à côté de son vélo un peu comme on guide un poney (je la soupçonne de savoir se servir aussi peu de son cycle que d'un ordinateur) et semblait ruminer de bien sombres pensées. Je ne sais par quelle folie, sans doute l'euphorie du week-end naissant, à moins qu'il ne s'agisse d'un vieux fond d'éducation, j'ôtai mes écouteurs et m'apprêtais à brailler une incongruité du genre « Bon week-end ! » voire à ajouter, puisque j'étais manifestement dans un bon jour « Tu n'es pas déjà dans le train pour la Bretagne ? » quand je me rendis compte qu'elle avait déjà commencé à me parler. C'était assez déroutant, parce qu'elle n'avait utilisé aucune des formules liminaires usuelles de type « bonjour » ou « tiens, vous ici ? ». En fait, elle semblait poursuivre une conversation que j'espérais avoir close quelques trois heures plus tôt. C'était un peu comme si ne nous étions jamais quittés et ça m'a fait un peu peur. Je me suis imaginé qu'elle croyait se trouver face à sa conscience. La seule idée qu'elle puisse se figurer Gemini Cricket sous mes traits me secoua d'un frisson. Je n'avais toujours pas dit un mot qu'elle me déballa tout son désarroi :
« Je suis vraiment très embêtée. Baryton a perdu un CD et je l'ai vraiment cherché partout. Une heure et demie, j'ai remué ciel et terre mais je n'ai rien trouvé. Alors je suis très embêtée, ohlala, c'est pour ça. J'espère qu'on ne le lui a pas volé. Surtout pas maintenant : il en a tellement besoin!»

Je ne savais pas trop si c'était Baryton, le collègue qu'elle idolâtre et qu'elle poursuit avec une obsession étrange (Cinderella ne nourrit pas les mêmes goûts que moi en matière de garçon, c'est assez rassurant) ou le CD qu'elle avait traqué jusque dans le moindre recoin : les deux hypothèses étaient également plausibles. J'aurais pu me taire, prendre une mine compatissante, hocher la tête gravement ou encore crier « je m'en fous » et poursuivre mon chemin. J'ai choisi l'option la plus absurde, celle dont je savais pertinemment qu'elle allait prolonger en vain cet éprouvant face à face : l'humour. Que voulez-vous ? j'ai moi aussi de curieuses manies.
« Cinderella, je commence à te connaître : avoue que c'est toi qui l'as volé, ce CD ! »
Le ton d'histrion et le regard estampillé « 100% je taquine » dont je pris soin d'accompagner cette boutade tombèrent 100% à plat, mais c'était couru d'avance.
« Voler un CD ? C'est pas du tout mon genre ! Et puis je ne veux surtout pas embêter Baryton. Ohlala, le pauvre ! Il a assez de soucis comme ça !».
Je me gardai bien d'avertir Cinderella que le seul souci que je connaissais à Baryton, c'était le sentiment malsain qu'il lui inspirait bien malgré lui(blog-note à venir) et me contentai de subir la répétition de sa tirade de doléances. Je me retins d'émettre l'hypothèse que le CD était DCD et parvins tant bien que mal à m'extraire de la conversation, non sans me demander où pouvait bien être ce damné disque. Mais, heureusement pour Baryton, je savais que l'inspecteur Lalouze avait jeté toutes ses forces sur l'affaire (« je suis à fond dessus hi hi hi ! », comme elle a coutume de répéter à tout bout de champ à propos de n'importe quoi).
Le lundi matin, je racontais à Baryton ma discussion avec sa collègue et lui présentais mes plus sincères condoléances pour la perte du CD. Il me répondit sans émoi :
« Je ne vois foutre pas de quel CD elle parle. »
L'enquête fut classée sans suite.

Pitou G.

2 commentaires:

Madame Patate a dit…

Pauvre Baryton !

Anonyme a dit…

J'adore tes billets sur Cinderella !!
Jecaracoledebarenbar.